Les victimes de violence conjugale ont droit à une indemnisation de la part de l'auteur des violences pour les dommages et les souffrances causés, ainsi que de la part de l'État.
La demande d'indemnisation – dommages et intérêts - à l'encontre de l'auteur de l'infraction peut être présentée de deux manières : au cours de la procédure pénale et sous la forme d'une action civile distincte.
Indemnisation pendant la procédure pénale
Une victime peut demander des dommages et intérêts à tout moment de la procédure pénale, sous la forme d'une demande adressée soit au procureur de la République soit au tribunal, selon le stade de la procédure pénale. Cette demande est appelée constitution de partie civile. Pour obtenir une indemnisation au cours de la procédure pénale, la victime doit demander à se constituer partie civile, car l'indemnisation n'est pas accordée automatiquement à la suite de la condamnation de l'auteur de l'infraction. La constitution de partie civile sera déclarée recevable par le tribunal correctionnel si la victime a souffert du fait de l'infraction.
La victime peut demander à se constituer partie civile avant ou pendant l’audience :
- Avant l’audience : La constitution de partie civile peut être faite à tout moment pendant la phase de la procédure précédant l’audience, par exemple pendant l'enquête ou après avoir déposé plainte au commissariat de police. La demande peut également être introduite juste avant le procès, en envoyant une lettre au tribunal avec toutes les pièces justificatives.
- Pendant l’audience : Au début de l’audience devant le tribunal de première instance, la victime peut demander à se constituer partie civile oralement lorsque l'affaire est évoquée par le président du tribunal ou en déposant une demande écrite. La victime ne peut se constituer partie civile que jusqu'au moment des réquisitions du procureur de la République, c’est-à-dire le moment où le procureur intervient et demande au juge de condamner l'auteur des faits.
La victime peut demander une indemnisation pour toutes les conséquences dommageables causées directement par l'infraction. Cela comprend la réparation de tout type de préjudice : matériel, physique ou moral.
Le montant des dommages demandés doit être étayé par des preuves, par exemple des factures d'hospitalisation, d'autres soins médicaux, de médicaments et autres. Le montant des dommages demandé doit être indiqué dans la demande. En effet, la victime qui souhaite obtenir une indemnisation doit constituer un dossier contenant une évaluation du montant de l'indemnisation pour chaque préjudice (moral, matériel, physique). L'évaluation doit inclure les coûts directement liés aux dommages subis. La victime doit également prouver que :
- le préjudice a été directement causé par l'infraction commise par l'auteur de l'infraction
- la personne à qui la victime demande réparation est responsable du préjudice
- le préjudice est réel et certain
- le préjudice concerne personnellement la victime
La décision sur le montant de l'indemnisation accordée est prise par le tribunal en même temps que la décision sur la responsabilité pénale de l'auteur de l'infraction. Si le tribunal rejette totalement ou partiellement la demande, la décision du tribunal peut faire l'objet d'un recours devant la cour d'appel, puis devant la Cour de cassation. La partie civile ne peut faire appel que sur la base de son action civile, ce qui signifie qu'elle peut contester le montant de l'indemnisation reçue, mais pas la peine infligée à l'auteur de l'infraction ni son acquittement. Si la demande d'indemnisation est rejetée en tout ou en partie à toutes les instances pénales, la victime peut encore présenter une demande devant les juridictions civiles pour le montant de l'indemnisation qui a été refusé par les juridictions pénales.
important Si la victime a exercé son action civile devant la juridiction civile, elle ne peut pas saisir la juridiction pénale pour la même requête, sauf si le procureur de la République a engagé des poursuites pénales avant que la juridiction civile n'ait statué sur le fond.
L'indemnisation en tant qu’action civile distincte des poursuites pénales
Une victime peut présenter une demande d'indemnisation en tant qu’action civile distincte devant la juridiction civile. Pour saisir la juridiction civile, il n'est pas nécessaire d'engager une procédure pénale. Cela signifie que si la victime ne souhaite pas engager de procédure pénale ou si l'acte de violence conjugale n'est pas considéré comme une infraction pénale en vertu du code pénal, la victime de violence conjugale a toujours le droit d'être indemnisée pour les dommages physiques et matériels et les souffrances morales causés par l'auteur des violences.
L'action civile devant les juridictions civiles peut aussi être introduite si elle a été rejetée devant les juridictions pénales, auquel cas la victime est exemptée du paiement de la taxe d'État pour l'introduction de l'action en justice.
Indemnisation par l'État
Les victimes de violence conjugale ont droit à une indemnisation garantie par l'État en vertu du code de procédure pénale. La victime ne peut demander une indemnisation garantie par l'État que dans les cas où une procédure pénale a été engagée, la personne a fait l’objet d’une décision définitive lui accordant des dommages et intérêts, et l'auteur n'est pas identifié ou ne paie pas l'indemnisation.
Dans ce cas, la victime doit faire une demande d'indemnisation auprès de la Commission d'indemnisation des victimes d'infraction ou CIVI à l'aide d'un formulaire spécial, qui transmet la demande au Fonds de garantie des victimes ou FGTI. La demande doit être accompagnée de toutes les pièces justificatives (certificats médicaux, factures, etc.).
La procédure est la suivante :
- La victime doit s'adresser à la CIVI de son lieu de résidence ou à celle de la juridiction pénale qui a statué sur l'infraction.
- La victime peut introduire cette demande jusqu'à un an après la décision finale rendue par le tribunal concernant l'infraction pénale.
- La demande est traitée par le FGTI qui dispose de deux mois pour prendre une décision et faire une offre d'indemnisation.
- La victime dispose alors de deux mois pour accepter ou refuser l'offre. Si la victime accepte l'offre, le FGTI lui verse l'indemnité dans un délai d'un mois. La victime peut également demander une nouvelle offre à la CIVI ou refuser l'offre actuelle sans en demander une nouvelle.
- Si le désaccord persiste, la CIVI poursuit l'instruction et rend une nouvelle décision qui peut faire l'objet d'un recours devant la cour d'appel dans un délai d'un mois.
En savoir plus sur la CIVI et le FGTI.
Si la CIVI n'est pas en mesure de verser une indemnisation, la victime peut s'adresser au Service d'aide au recouvrement des victimes d'infractions (SARVI) à l'aide d’un formulaire. Le SARVI versera le montant total ou partiel de l'indemnisation accordée par le tribunal et le récupérera le montant auprès de la personne condamnée.
L'intervention du SARVI est soumise à trois conditions :
- La victime est un particulier qui a obtenu une décision du juge pénal lui accordant des dommages et intérêts et éventuellement le remboursement de tout ou partie des frais du procès.
- La victime ne peut pas être indemnisée par la CIVI. Si la victime a fait une demande à la CIVI qui a été rejetée, la victime ne peut saisir le SARVI que dans un délai d'un an à compter de la décision de la CIVI.
- La personne condamnée n'a pas payé le montant de l'indemnité dans les deux mois suivant la condamnation définitive.
En savoir plus sur le SARVI.
Indemnisation et droits de l'homme
L'indemnisation des victimes est l'une des composantes d'une réparation appropriée du préjudice dans les cas où elles ont souffert de violences physiques ou émotionnelles. Il incombe donc à l'État, d'une part, de veiller à ce que le cadre juridique prévoie la possibilité de demander une telle indemnisation et, d'autre part, de s'assurer que les demandes d'indemnisation sont examinées par les autorités publiques compétentes conformément à la loi.
Le fait de ne pas garantir les dispositions légales en matière d'indemnisation ou le fait que les autorités compétentes de l'État n'accordent pas d'indemnisation conformément aux dispositions légales appropriées peut entraîner une violation du droit à un recours effectif.